mercredi 22 août 2012

AMABILITÉS

ET SAVOIR-VIVRE


Je me sens bien dans ma yourte, et j’ai la flemme de prendre mon sac. Paressons sur place, je vais vous révéler comment nous vivons le temps des conversations, quand nos hôtes sont turcophones. Pourtant ce fut une déception quand nous avons été déclarés indésirables dans le Pamir, alors que j’avais révisé mon vocabulaire persan pendant tout le mois de juin : nous ne sommes turcophones, ni l’un, ni l’autre.

кыргыз   республикасинин
République kirghize

Par chance les kirghizes sont presque tous bilingues et russophones.
Par chance encore, mes parents m’avaient fourré dans un collège slave en sixième.
Un collège tenu par des jésuites de rite orthodoxe, avec des professeurs russes blancs, en 1961, alors que la Révolution d'Octobre c'est 1917 ! Vous imaginez mon sort !
Mais j'ai un ange gardien, qui a su fermer ce collège à mon entrée en cinquième. Ouf !
... dommage pour les conversations en 2012...

Les panneaux routiers utilisent les deux alphabets.
L'alphabet latin y figure selon la transcription anglo-saxonne :
il faut prononcer "Bar-Boulak"

J’ai gardé en mémoire l’alphabet cyrillique, et quelques mots plus ou moins utiles. Vous allez vous rendre compte que vous parlez russe aussi bien que moi. La preuve :

Il y a bien sûr les trois exemples que l’on se plait à citer :
Le mot qui se prononce « bistro » et qui veut dire « vite », passé en français depuis l’occupation de Paris en 1814, quand les cosaques exigeaient un service rapide dans les cafés.
Le mot « karandache » trop joli, pour dire « crayon ».
PECTOPAH, l'exemple du métissage des alphabets, qui se prononce « restorann » et dont le sens tombe sous le sens.
Mais « magazinn = magasin » était tout aussi facile et plus utile. Il faut juste savoir le lire МАГАЗИН. Avec « où ? = gdié ?» il devient indispensable.
De même, en ville, lire internet sur ИНТЕРНЕТ. 
Et vodka sur ВОДКА, mais là, ce n’est même pas la peine de lire, ça vient tout seul.


Vous pouvez lire : c'est bien le magasin de Min Kouch 

Grâce à la propagande, vous connaissez : pravda = la vérité, izvestiya = les nouvelles, spoutnik = le satellite, mir = le monde. Vous aurez un peu de chance si vous les placez dans la conversation.

Rue Lénine : les relations avec le grand-frère russe sont restées excellentes.


Par contre "babouchka, dedouchka, mama, papa", vous sont familiers, vite complétés pour les photos de famille, par « épouse, mari, fils, fille » grâce à leurs racines indo-européennes : géna, mouj, sin, dotch. C'est bien aussi de savoir compter pour le nombre des enfants : odinn, dva, tri, tchétiriyé. Nous ça s'arrête à tri diéti : trois enfants. Tchétiriyé exige une autre implication...
Pour la maison, comme vous, nous avons longtemps dit « datcha » au lieu de « doma » : passions-nous pour nomenklaturistes ?
Pour être aimable, balchoyé spassibo = merci beaucoup, dosvidaniyé = au revoir, priviet = bonjour, pajalousta = je vous en prie, sont quotidiens.

Après les plats, les boissons : thé, café, et maksoum

Et le thé est presque partout "tchaï" dès qu'on quitte l'occident.
En Kirghizie, tchaï-thé et moloko-lait sont indispensables. J’apprendrai vite « biz = sans » pour dire tchaï biz moloko, quand je serai un peu malade : ia bolienn. Pour le koumis je suis resté bolienn jusqu’à la fin du voyage, avec une rotation de la main droite devant l'estomac.

Un mot pour Yvon, sur la 4ème ligne : stomatologuitcheskoié

Vous êtes français, sentimentales et séducteurs, et vous dîtes spontanément « j’aime : ia lioubliyou » C’est assez pratique, car on peut toujours aimer un tas de choses et ça fait plaisir.
Essayez : ia lioubliyou tchaï, ia lioubliyou koumis...

Apprenez au moins « ia govoriou » : je parle. Que ce soit kirghize, russe, français, anglais, ou tadjik, il vous suffit de rajouter -sky : roussky, frantsouzsky, anglisky. Facile.
Mon interlocuteur là-bas : "tadjiksky !!!  ça sert à quoi ???"

Les deux questions rituelles, sur tous les chemins du monde, exigent peut-être un apprentissage :
D’où venez-vous ? « Otkouda ? » presque comme en persan « az kodjâ ? »
Réponse : Frantsia, en précisant frantsouz, frantsouzsky, pour agrémenter le vocabulaire.
Et forcément "machiné gdié ?" Na ! « piechkom » à pied ! Pas de voiture ! (La voiture d'Yvon était toujours "en France", je crois qu'il craignait de passer pour un va-nu-pied).


OPASNO ! DANGER ! Mieux vaut l'ignorer...

Et notre âge ou la durée du voyage exigent "année = god", "jour = dienn",  puis le nombre avec les doigts. Petit claquement de langue sceptique et réprobateur : à cet âge, crapahuter, c'est quoi, ça ?
« Voda » pour « eau » décrivait les ruisseaux et les rivières de nos itinéraires…
Pour la boisson, c'était plutôt "pivo", la bière.


Cette bière naturelle s'appelle "arpa", ne lisez pas "apna"

Et « ia nié znayou » je ne sais pas : ça, ça coupe court.
Ben voilà, les conversations n’allaient pas beaucoup plus loin, ou alors il fallait avoir recours aux mains.
Yvon a copié scrupuleusement tout un tas de mots, depuis jument et chien jusqu’à cassis et argouse, mais ils ne sont pas dans mon cerveau.



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