mardi 28 août 2012

STAR PARMI LES STARS



AMÉLIE !


 
 La contemplation des photos familiales

Le savoir-vivre, en nous installant chez nos hôtes d’une heure, veut que nous nous présentions. Mais nos prénoms font un peu pauvres. Là-bas chacun fait partie d’un clan, et porte un nom qui répertorie au moins celui de son père et de son grand-père. Chacun a une origine géographique, et chacun s’inscrit dans l’Histoire grâce à l’Epopée de Manas qui donne son identité culturelle au pays depuis l’indépendance. Tous les kirghizes sont  fiers de ce poème épique qui chante les exploits du fondateur légendaire de la nation en vingt fois plus de vers que l’Odyssée.
Une fois de plus, nous allions regretter d’être muets, car les hauts faits de Lancelot et Perceval, nos chevaliers à nous, les cousins de Manas, n’auraient eu aucun mal à séduire un auditoire acquis d'avance.


 Manas trône à Bichkek

Nous nous contenterons de dire que nous venons du bout du monde, le Finistère évidemment, et que nous vivons sur les rivages de l’Océan. Dans nos esprits, l’Océan Atlantique était plus prestigieux que la Manche que nous aurions appelée Channel…
Vu du Kirghizistan, vivre en regardant le soleil se coucher dans la mer était en soi très exotique, très aventureux, et presque fabuleux. Cet éclat rejaillissait sur nous.

Ensuite, nous passions cérémonieusement à la présentation de notre clan. Notre clan est toujours resté strictement familial, même quand nos interlocuteurs espéraient y rattacher Messieurs Jules Verne, Zinedine Zidane ou  François Hollande. Pourtant notre localisation maritime aurait dû m'inciter à choisir le capitaine Némo comme aïeul naturel, et bénéficier ainsi de son aura toujours vivante en Asie Centrale.
Il faut dire que je tirais parti de sujets d'un grand intérêt dans mon proche entourage. Les autres membres du clan familial vont certainement être jaloux, car seuls trois d’entre eux éveillaient une curiosité, un étonnement ou une admiration systématiques et répétés.  Qu’ils se rassurent, ils étaient quand même examinés en détail sur les photos, et suscitaient aussi des questions, mais moi je n’écris pas un poème épique de 500.000 vers et je dois faire court.


 
 Voilà le clan : quatre générations

En premier lieu, Quentin était celui que je ne pouvais renier. Quentin, c’était moi en plus jeune. Parfois même Quentin était moi jeune. Et Quentin porte une attelle sur la photo, et c’était peut-être dû à une chute de cheval ? J’ai dit non, puis j’ai dit oui, parce que sinon c’était la déception. En Kirghizie, il est plus prestigieux de tomber de cheval que de tomber de vélo, même BMX. Et traduire BMX par бмкс, c’est pas sûr que ça marche. Bozkachi, c’est mieux ! 
Surtout que c’est un mot persan, bâti sur boz, la chèvre, qui s’écrit بز


 
Manas, lui-même !

En second lieu, Daddy était à lui seul un mythe presque aussi grand que Manas : atteindre 92 ans, avec une telle bonne mine, faisait de lui un personnage de science-fiction. Souvent les messieurs âgés qui s’intéressaient à mon âge personnel s’avéraient plus jeunes que moi, à leur grande surprise : leurs conditions de vie en altitude, et les hivers rigoureux leur tannent et burinent le visage sans pitié. L’espérance de vie n’est pas la même qu’en occident, et Daddy faisait figure de patriarche exceptionnel.




Mais la star des stars, l’héroïne digne de Manas, la fée Morgane exilée, c’était sans conteste Amélie ! Amélie focalisait l’attention d’emblée dès que je dépliais ma planche de photos, et j’avais à peine le temps d’expliquer qu’elle était la femme de mon fils aîné, la mère de mon petit-fils et de ma petite-fille, qu’il fallait répondre à l’exclamation spontanée, pleine d’éloges sous-entendus, et d’espoir prometteurs : " Elle est kirghize !!! "
C’était une telle joie, et un tel compliment, que j’ai vite renoncé à détromper mes hôtes. J’ai fini par confirmer que j’étais convié la semaine suivante à Tach Rabat dans la yourte des beaux-parents de Jean-Baptiste… Merci, Brigitte et Claude, pour cette occasion unique de découvrir votre généreux pays !   


L'intérêt pour les photos

3 commentaires:

  1. Brigitte R13.10.12

    Vous serez toujours les bienvenus dans notre yourte !
    Quelle joie - et merci - de m'avoir fait vivre un instant une autre vie !

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  2. Effectivement, je suis un peu déçue de n'avoir pas suscité la curiosité des kirghizes...

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  3. Tu devines bien quelles questions tu suscitais.
    Compte tenu de ton âge, et de l'âge moyen des mariages là-bas :
    "Pourquoi n'a-t-elle pas encore d'enfants ?"
    Je n'avais pas la réponse !

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